Allumer la light

Nos 4 phares

Plusieurs phares se dresseront fièrement au bout du finistère de Paspébiac. Ces monuments font partie du patrimoine maritime de notre beau patelin.

Carte postale, vers 1910

Le premier phare est érigé (1870-1882)

1857

Les doléances de Pierre Fortin

En 1857, l’écuyer, magistrat stipendiaire et commandant Pierre Fortin plaide pour l’érection d’un phare à Paspébiac, à l’évocation de navigateurs qui n’ont pas pu accoster à Paspébiac en raison de l’obscurité et des périls que présente le bout du banc de sable.

En outre, Pierre Fortin mentionne, dans son rapport, que de toute la côte de Gaspé, il n’y a que deux endroits où les vaisseaux frappés par des tempêtes peuvent trouver un abri sûr : Gaspé et Paspébiac. Il recommande un phare en bois, qui aurait une vingtaine de pieds de hauteur et qui rendrait les plus grands services aux marins et aux pêcheurs.

1870-1872

Vers la construction

La construction du phare se termine en 1871. On salue sa dépense modique, son entretien peu coûteux et le fait qu’il est un guide sûr pour les bateaux de pêche. La même année, presque en face, est érigé un phare à Caraquet. Notre gardien du phare a une rémunération de 100 $ en 1870, puis de 150 $ l’année suivante.

Extrait des Documents de la session de la puissance du Canada, 1870. Le phare y est décrit.
Plan montrant les lots de plage et les bâtiments érigés sur a pointe de Paspébiac et la ferme appartenant à l'entreprise de MM. Charles Robin et Co. située à Paspébiac, canton de Cox, 1870.
Dans les Documents de la session de la Puissance du Canada, 1870. Un phare s'est allumé!
Vue de Paspébiac à partir du phare dans L’Opinion publique (18 octobre 1877, vol. 8, no 42, p. 498-499).

1874

En 1874, une digue est construite pour protéger les fondations du phare durant les grandes marées. 

1877

1880

En 1880, on souligne l’importance de déménager le phare, et rapidement. En effet, on mentionne dans un rapport que des dommages causés par l’eau aux fondations du phare exigent qu’il soit déplacé. Des soumissions paraissent dans différents journaux pour la construction des plans.

1882

En 1882, on apprend que la tour de Paspébiac a été démolie et remplacée par une nouvelle lanterne.

Deuxième phare (1882-1921)

En 1882, une nouvelle tour est érigée, et on lui ajoute un an plus tard une lumière rouge (« a ruby glass »). Cette construction a coûté 216 $.

1884

En 1884, dans l’ouvrage The cruise of the Alice May, on apprend que près du phare se trouvent une vieille dépouille de bateau ainsi qu’un restaurant, le Lion Inn.

1894-1921

Entre 1894 et 1921, une série de réparations sont faites sur le bâtiment. Des réparations aux fondations de la tour sont effectuées « par le gardien et des ouvriers de la localité » en 1894 : un porche, un petit poêle et des extincteurs à feu se greffent aux équipements du phare. En 1908, on mentionne qu’il y a un dwelling, soit une petite habitation, tout près du phare, et en 1917, la compagnie Robin, Jones & Whitman se fait octroyer un droit de passage vers le phare.

En raison de l’érosion, le phare est relocalisé plus loin sur le banc en 1921.

Le phare dans les années 1920. Source : Lighthouse friends.
Le phare, possiblement avant qu’il ne soit annexé à la maison du gardien.

Deuxième phare relocalisé (1921-1963)

En novembre 1921, le phare est déplacé. La même année, John Leblanc érige une tour de six pieds en métal à la station.

Voici comment on le décrit en 1923 :

Dans Canadian port and harbour directory, 1923.
Le phare vers 1940. Source : Garde côtière canadienne.
Le phare vers 1940. Source : Garde côtière canadienne.

1956

En 1956 et en 1960, les deux phares – celui qui a été déplacé et la nouvelle tour construite par John Leblanc – semblent se côtoyer sur le finistère.

Un extrait confirmant le déménagement du phare.

1963

Le phare est détruit lors d’une violente tempête en novembre 1963.

Le grand-père de Sébastien Joseph, natif de Paspébiac, était gardien de phare à ce moment. Voici ce qu’il dira de cette tempête :

« Il est monté dans la tour pour allumer la lampe en pleine tempête et, quelques minutes plus tard, la tour était détruite. Il montait dans l’échelle centrale et, ce soir-là, il avait dû s’attacher des oreillers au corps pour ne pas se blesser. »

Questionné sur le travail de son grand-père, Sébastien Joseph dira la chose suivante :

« Tous les soirs, il devait monter un contenant d’huile dans la tour et pomper celle-ci dans un réservoir. Le phare n’était en fait qu’une simple lampe à l’huile dont la lumière était amplifiée par un jeu de miroirs rotatifs qui devaient être frottés avec du mercure afin d’obtenir le maximum de réflexion. S’il y avait de la brume [on aperçoit un petit bâtiment au pied de la tour], il s’agissait d’une corne de brume mécanique. Il allait l’actionner au besoin. À son retour de la guerre de 39-45, mon grand-père avait une cordonnerie et, le soir venu, il allait allumer ce qu’il appelait la light. Malheureusement, nous n’avons pas de photos de cela. »

La cabane du gardien, située au pied du phare, serait encore dans le village, selon plusieurs citoyens… mais où? Mystère!

Phare de Paspébiac. Source : Yves Whittom.

Troisième phare (1964-1970?)

En 1964, une tour est replacée avec une lumière électrique qui élimine le besoin d’avoir un gardien de phare à temps plein. 

Quatrième phare (1970-2004?)

Selon le Lighthouse Digest, le phare est reconstruit en 1970 et est inactif en 2004, mais on ne sait pas exactement quand il a cessé d’être en fonction.

Le "fog signal" en 1993. Source : Garde côtière canadienne.
Source : Steve Joseph.

En 2002, la tour tangue dangereusement et ploie sous une tempête…

Des canons à brume

En 1885, dans The cruise of the Alice May, on précise qu’il y a des canons rangés sur le quai.

Une station météorologique

En 1892, on implante une station de signal d’alarme à Paspébiac. Curieusement, on trouve plusieurs déclinaisons de ce nom : dans certains documents, on mentionne qu’il s’agit d’une station météorologique ou d’une storm signal station; dans d’autres, il s’agit d’une station de tambour, ou drum station, tenue par Bryan Murray de Paspébiac.

On ne connaît pas l’emplacement de ce bâtiment, mais on peut présumer qu’il s’intègre aux structures liées au phare.

D’ailleurs, en 1899, on effectue des travaux au hangar des signaux. En 1902, on mentionne que le mât devra être repeint ainsi que les bâtisses des signaux (mast signal), que les étais devront être serrés et qu’un cône neuf devra être installé. Le mât sera repeint en 1906.

La station de Paspébiac aura les caractéristiques d’une second-class station avec l’observation de la température et de ses extrêmes, la direction et la vélocité du vent, ainsi que l’état général de la météo, pris trois fois par jour et à des intervalles réguliers, la pluie et la neige étant aussi comptabilisées (Rapport sur les stations météorologiques, 1907).

Voici les signaux qui pouvaient être envoyés des stations météorologiques au Canada, dont Paspébiac fait partie.

Les gardiens de phare

1870-1872John F. GallieJohn F. Gallie gagnera, en 1872, 100 $ par année. C’est lui qui nous offre une première description du phare, en 1872. John Francis Gallie serait né en 1824 à Paspébiac et marié en 1846 à Elizabeth Whittom. Il décède en 1899.
1872-1880M. L. StrongGardien du phare dès 1875 et probablement dès 1872. Décède en 1880.
1880-1894John Loisel pèreJohn Loisel aurait aussi agi comme conseiller municipal.
1894-1925?John Loisel filsJohn Loisel fils est appointé en 1894. Il gagne 150 $ en 1894 et il obtient des primes pour l’exercice du canon à brume. Il gagne 200 $ par année en 1897. 
1927-1931A. AspirotGardien du phare de 1927 et 1931.
1931-1932A. PoirierGardien du phare de 1931 et 1932.
1932-au moins 1937J.-B. LabourdetteGardien du phare de 1932 à au moins 1937.
1945-1951Charles MorinGardien du phare de 1945 à 1951.
1951-1963Léonard JosephLéonard Joseph, en plus d’être gardien du phare dès 1951, s’enrôle dans l’armée dans le cadre de la Deuxième Guerre mondiale, dans le Régiment de la Chaudière. Il était présent lors du Débarquement de Normandie. Il avait un éclat de grenade sous l’ongle du pouce. 
Le phare et ses goélands... Source inconnue.

Ils ont écrit sur le phare

La maison sur la grève

« Pendant que les hommes abattent des pans entiers de forêts, buchant et sciant une grande partie de la journée, les femmes tiennent le phare allumé et s'occupent de la maison, de l'ordinaire et de la marmaille. Dans le village de Paspébiac, personne ne chôme et les Émérentienne, Cédulie, Léontine, Lucienne et combien de leurs semblables affrontent la dure saison avec leurs enfants nichés dans les plis de leur jupe. » Lina Savignac, 2010

Pierre qui roule

« Ce voyage avait fortement intéressé Quéquienne. Il était monté au sommet du phare de Paspébiac, avait visité les grands séchoirs de morue des Le Bouthiller (sic), avait rencontré à New-Carlisle deux autres de ses anciennes connaissances [...] » Rémi Tremblay, 1923

Une vierge pêcheresse

« Romaine pris la barre, son grand-père s'empara des cordages de la voilure pour se garder du vent en tournant, et la barge, décrivant un hémicycle parfait, fila sous le vent, le nez sur le phare qui, là-bas, embrasé sous les feux du soleil à son zénith, ressemblait à un iceberg étincelant sur l'émeraude de la mer. » Rodolphe Girard, 1955

Confidentiellement

« C'est en escaladant les marches escarpées d'un de ses plus jolis phares - le phare de Paspébiac - que j'ai connu le vertige. » Michelle Tisseyre, 1959

Le phare du Banc de pêche de Paspébiac, Annie Chapados. Acrylique, pinceau et spatule, 24 x 12 po, 2020.
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